Dans son village règne la misère.
La nourriture se fait rare, la mort rôde,
L'espoir dans les cœurs aigris s'érode.
Le soleil brûlant a desséché la terre.
Lui veut partir pour sauver les familles,
Il veut pouvoir leur envoyer de l'argent
Glané sous d'autres cieux, d'autres gens,
Pour acheter un peu de riz, un peu de mil.
Il fait ainsi la quête dans tout le village,
Chacun pioche dans ses maigres biens
Pour préparer le périple qui sera le sien.
Ils lui font confiance malgré son jeune âge.
Il part à travers l'Afrique avec son pécule,
Cheminant tantôt à pied, tantôt en car rapide
Qui, malgré leur nom, ne sont pas des bolides.
Il change bien souvent de véhicule.
Il arrive enfin aux portes du désert.
Là , son butin déjà écorné se met à fondre.
Les migrants sont des cibles faciles à tondre,
Il est trop tard pour faire machine arrière.
La traversée est horrible, des heures de route,
Sous le soleil cuisant entassés en grappes
Et pour les repas, pas question d'agapes,
Juste de l'eau pour casser la croûte.
Après quelques pannes et beaucoup d'attente,
Il arrive enfin près de cette terre d'asile.
Il sait qu'il lui reste encore à franchir les vigiles,
Le passage, c'est cette nuit qu'il le tente.
Hélas, au cœur de l'obscurité presque totale,
Alors qu'il vient de franchir les barbelés,
Il entend soudain une sirène qui se met à hurler.
Dans la nuit chaude monte la mélodie fatale.
Dans sa geôle barreaudée il ne voit plus le ciel.
Dans ce pays convoité où la vie continue,
Jamais ses souffrances ne seront connues,
Parfois l'existence a un méchant goût de fiel .