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Sur la cheminée, un bouquet de fleurs séchées de couleur rousse qui s’évase comme un feu de brindilles, comme des flammes qui se reflètent en un double fantomatique dans le miroir où viennent aussi se peindre le jeu d’échecs sur le piano et la lampe et donnant à la pièce une plus vaste amplitude, ouvrant sur un espace imaginaire, la vision flotte dans l’air comme si elle était en suspension, où la voit-on, dans le miroir ? non, le miroir n’a pas de profondeur, il n’est qu’une surface plane, comment se fait-il alors qu’il fasse sentir la troisième dimension, qu’il permette une percée vers un autre monde fantasmatique, qu’il donne l’illusion de l’espace tridimensionnel,… quelques photographies de mes parents à l’époque de leur mariage et de mon grand-père qui ressemblait à Pierre Fresnay, une boîte incrustée de pierres semi-précieuses, des galets et une pierre blanche en forme de buste qui m’ont été donnés comme des preuves d’amour, une autre boîte dans les tons de bleu dont le couvercle est ébréché, un mannequin servant de modèle à peindre qui m’a été offert pour Noël.

La peinture, je m’y suis essayée, mais c’est trop difficile de rendre sa vision, pas plus que la photographie, elle ne me permet de rendre ce que je vois vraiment comme ces pots de confiture que j’ai représentés posés sur une nappe blanche, parce qu’au petit déjeuner ils m’apparaissaient dans leur parure de pourpre et d’or et dans une lumière si étincelante qu’ils resplendissaient de mille feux, qu’ils étaient comme embrasés par un Soleil rouge, qu’ils faisaient retentir leur symphonie de couleurs rosées et orangées qui m’éblouissait de sa splendeur.

Une autre fois, je me suis essayée à peindre une nature morte avec des oignons et des gousses d’ail. J’avais posé sur la cheminée le livre d’Henri Maldiney, « L’Art, l’éclair de l’être », parce que je voulais mêler le texte et l’image. J’ai tracé des signes sur la surface du tableau à l’aide des couleurs qui ne figuraient plus les objets mais renvoyaient à la divinité, absente de la réalité mais que le tableau rendait visible, palpable, tangible. En fin de compte, mon art ne représentait plus des objets mais était la trace encore sensible au creux du quotidien de l’éclaircie de l’être, de la clairière où s’abrite l’étant et dans son éclosion, je voyais poindre une lumière d’aurore, la lueur d’un autre monde qui s’ouvrait à moi dans une sorte d’angoisse abyssale, un monde de naissances et de métamorphoses, un monde non plus dévasté par la main de l’homme mais gardant mémoire des Dieux et de leur rapport à l’être de l’homme. J’ai laissé le fond nu parce que les choses semblaient émaner d’un abyme, d’un néant, d’un rien qui s’entrouvrant laissait advenir le monde dans sa beauté originelle, dans son harmonie première. J’y ai juste peint les lettres du titre du livre avec le noir d’une écriture calligraphique. Puis insatisfaite de ce que j’avais réalisé, j’ai tout recouvert d’une couche dorée, puis d’une couche de noir laissant affleurer des taches de lumière pure ainsi que la composition. Le noir, c’étaient les ténèbres, la nuit dont surgissait comme la beauté d’un cygne sur un lac autour duquel les passants se promènent le dimanche la blancheur de l’oignon, sa couleur orangée ou bordeaux selon ses différentes espèces. La nuance du livre posé sur la cheminée créait une affinité avec la rougeur de l’oignon, ce qu’en poésie on appelle un écho sonore, en musique une consonance.

En somme, les choses ne sont pas pour moi des objets purement fonctionnels, des outils destinés à des fins concrètes et pratiques ou des denrées prêtes à consommer, elles se manifestent dans un horizon entièrement neuf, comme si je ne les avais jamais vues, dans une lumière qui les illumine de sa clarté radieuse, comme si elles étaient, elles qui paraissent à tout un chacun bien connues, étrangères et par conséquent étranges. Elles recèlent un infini mystère, celui de l’Etre qui se déclôt par instants pour laisser entr’apercevoir la merveilleuse beauté du dehors, dans sa richesse et sa plénitude. Un peu comme un point d’orgue, comme un crescendo qui peu à peu, dans sa lente montée, finit par laisser entendre un son très aigu et qui est comme l’apothéose du morceau de musique, l’apogée ultime, l’acmé dernière.

Claire d'Orée


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  • Tétanisante inertie
    28.05.2020 12:18
    procrastination ?
     
  • Larme...
    28.05.2020 12:17
    je pense que je voulais dire un truc spéciale... caché... intrigant :-)
     
  • Larme...
    28.05.2020 12:15
    bah en fait je ne sais même plus ce que voulais dire !! lol :-) en tous cas attristés prend ées :-)
     
  • Haïku doré
    26.09.2012 16:01
    Bon Jour, Ciel, Si je puis me permettre, en toute amitié: 5/7/5 Vaste champ d'épis - Mot de saison ...
     
  • Lettre par Aurore Dupin
    23.09.2012 10:27
    aurore Dupin est le vrai nom de George Sand, elle a envoyé cette lettre à Alfred de Musset... je vous ...