ROUBAIX
Roubaix, vieille ville sinistrée
A l’avant-garde de la souffrance sociale
Où le mouvement ouvrier
Fut banni dans une exclusion totale
Roubaix, qui aujourd’hui
Assiste ma pauvreté
Quand en poste avancé du Tiers-Monde
Dans la décadence névrosée
De notre pays
Elle est cette femme africaine
A qui je souris
En faisant la queue
Dans le bureau des Å“uvres sociales
Et qui me raconte avoir fui
Son continent lui aussi sinistré
Roubaix qui accueille la diversité
Des cauchemars de réfugiés
De toutes sortes
Grâce aux Droits de l’Homme
De ses riches solidarités
Roubaix, petite sœur d’Alger
Quand à la fin d’un ramadan
Soulagé enfin par une fête de l’amitié
Le Maghreb enrichit son authenticité
Roubaix, où les sirènes des filatures du passé
S’émeuvent comme des souvenirs traumatisés
Où son art populaire est aussi devenu
Un rap languissant et suicidaire
Un cri violent de sa jeunesse
Qui n’est même plus ravitaillée
Roubaix, dans son ghetto
Des beaux quartiers
Qui n’ose plus affronter cette misère
Capable d’agresser
Son sentiment troublé de la charité
Préfère s’oublier dans un repli de classe
Mal sécurisé par une police
Qui a trop à faire
Roubaix aux cheveux blonds
Roubaix aux cheveux noirs et frisés
Roubaix de la mixité
Ne dit plus rien
Mais pleure en secret
Dissimulant mal
Son présent sans futur
Roubaix , enfin habitée
Par les démons de nos pensées
Ne prie même plus
Délaissée par la religion du profit
Mais moi, comme d’autres poètes clandestins
Je refuse que ma vieille ville
En mère qui m’a conçu
Agonise dans le supplice
De soins palliatifs
Dans le désir puissant
De te ressusciter
En femme heureuse de s’accoupler
Je lustre une base d’envol pour toi
Quand conscient de l’inconscient
Du rêve de ta diversité
Qui vit de fait l’universalité
Dans la science-fiction
D’un scénario
En voie d’achèvement
Un vaisseau emmène ton errance
Vers un monde nouveau
Où enfin tu retrouves l’appétit
Pour l’idéal de la vie
mardi 19 mai 2009